Retour au présent

Publié le par bienvenuechezlesfous

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           Donc, je suis en isolement.

La pièce est carrée. Ses murs blancs. Le plafond, comme ailleurs, constitué de dalles régulières. Au milieu, un tube néon dont l'interrupteur se trouve à l'extérieur. Il n'y a pas de poignée de ce côté-ci de la porte et un hublot rectangulaire perce le mur à quelques centimètres au-dessus de mon visage. Il est occulté par un tissu opaque qui, comme l'interrupteur, ne se manœuvre que du couloir.

Avec beaucoup de dérision, on pourrait presque dire que la déco, dans son extrême dépouillement,  est tout imprégnée d'esprit Zen. Malheureusement, ces derniers temps, mon sens de l'humour semble curieusement tari.

Posé à même le sol, un bassin hygiénique en matière plastique blanche est l'unique concession au confort de ce qui est désormais ma cellule. Pour combien de temps ? Je n'en ai pas la plus simple notion, mais je ne suis pas loin de penser que c'est entre ces quatre murs que je passerai le reste de ma vie.

Encore une fois, j'ai peur.

Il faut que je sorte d'ici quel que soit le prix à payer. Il faut que je sorte d'ici même si je dois y laisser la peau.

Voilà donc que je me mets à tirer sur mes sangles comme le forcené que je suis devenu. Rien ne bouge, naturellement. J'essaie ensuite de libérer mes poignets en comptant sur la sueur qui me couvre le corps pour faciliter le glissement hors des liens.

Bien tenter, mais doit mieux faire.

Je me contorsionne comme un artiste de music hall pour essayer de voir comment tout mon harnachement est fixé à mon lit. Peut-être y aurait-il ici quelque faiblesse ignorée du dispositif de contention ? Que nenni ! Tout est bloqué. La rusticité de l'installation lui confère une redoutable inviolabilité. Du bois, du cuir, des boucles de métal incorruptibles que serrent des vis que seule une solide clef à pans peut débloquer.

Le temps doit sûrement poursuivre sa fuite monotone et sans hâte, mais je ne m'en rends même plus compte. Aux périodes de veilles hallucinées, succèdent des phases de semi-coma ténébreuses.

Lorsque s'entrouvrent mes yeux, se découpe devant eux le grand rectangle froid d'une vitre miroitée. Je peux donc apercevoir un morceau de ciel grisâtre mais il est hors de question qu'un observateur indiscret puisse me regarder quand bien même il serait perché sur un satellite espion.

Je suis ici chez moi.

Libre de faire tout ce qui me plait sans l'entrave gênante des habituelles conventions. Je peux hurler, baver, me compisser d'abondance, et même plus si le cœur m'en dit. Je peux, sous mes liens, me dystordre autant qu'il me plaira sans que quiconque ne vienne troubler ma solitude.

Elle est pas belle la vie ?

 

 

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Publié dans Litterature

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P
<br /> C'est étouffant !<br /> <br /> <br />  Effectivement quand l'on est mis hors d'état de nuire les satellites espions n'en n'ont cure.<br />
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B
<br /> <br /> Un poil étouffant c'est vrai...mais ce n'es tqu'un début !<br /> <br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> <br /> N.Desnos<br /> <br /> <br /> <br />